Grossophobie dans la sphère professionnelle : le droit à la différence !
Publié leEn France, l’obésité touche 17,2% des adultes. Malgré ce chiffre, les personnes fortes sont encore majoritairement absentes de l’espace public et la cible de moqueries et discriminations. Il y a urgence à mener des politiques publiques fortes pour lutter contre cette discrimination.
Que désigne la grossophobie ?
La grossophobie désigne l'ensemble des comportements qui stigmatisent et discriminent les personnes grosses, en surpoids ou obèses. Elle a pour origine des préjugés et des stéréotypes négatifs selon lesquels le fait d'être gros est une question de volonté personnelle et que les personnes grosses seraient ainsi les seules responsables de leur surpoids, en négligeant les autres facteurs à l'origine du surpoids. La grossophobie se traduit par des discriminations dans plusieurs domaines de la vie comme dans l'accès à l'emploi et elle affecte également les relations interpersonnelles à travers des critiques verbales et des discriminations.
Les femmes particulièrement visées par les discriminations
45% des demandeurs d’emploi interrogés estiment qu’il est acceptable de refuser un emploi à quelqu’un du fait de sa corpulence. Ce chiffre malheureux illustre tout le chemin qu’il reste à parcourir. Selon une étude de l'Organisation internationale du travail (OIT) et le Défenseur des droits, les femmes obèses sont huit fois, et les hommes obèses trois fois, plus discriminés à l'embauche. Selon une étude des mêmes sources en 2015, l'apparence physique est le 2e critère après l'âge et avant l'origine, le sexe, le handicap, sur la perception des discriminations. Ainsi, une personne en état d’obésité peut être privée de plusieurs opportunités professionnelles alors même que ses compétences intellectuelles et personnelles lui permettraient d’occuper bien mieux le poste.
Le droit à la différence !
Dans un arrêt du 18 décembre 2014, la Cour européenne de justice a reconnu l'obésité, soit un IMC supérieur à 40, comme un handicap quand elle rend difficile la participation à la vie professionnelle. Mais les personnes en situation de surpoids demandent d’abord à être traité comme les autres. D’ailleurs, l’article 225-1 du code pénal rappelle que «constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur apparence physique». Ce type de discrimination est cependant très difficile à prouver. En effet, un recruteur n'a pas d'obligation de justifier un refus d'embauche, même si le candidat évincé lui en fait la demande. En cas de non réponse, cela pourrait toutefois être un élément de suspicion d’une discrimination.
Rappels juridiques en matière de discrimination
Il convient en effet de rappeler que s’il est possible de porter plainte, la règle en droit pénal est la présomption d’innocence. La victime devra prouver l’existence d’un acte discriminatoire. En revanche, en matière civile devant le Conseil des Prud’hommes la règle de la preuve est aménagée. La victime de grossophobie devra apporter des éléments permettant de suspecter une discrimination. Il n’est pas demandé de preuves formelles, mais des faisceaux de présomption. Dans ce cas, il appartient non plus au plaignant de prouver la culpabilité de l’auteur présumé, mais à l’entreprise de prouver l’absence de discrimination.
A l’heure actuelle il a très peu de contentieux relatifs à la grossophobie car les personnes qui en sont victimes ne connaissent pas leurs droits ou n’osent pas à réclamer justice devant les tribunaux. Ces réactions illustrent une perte de confiance en la capacité des politiques publiques à lutter contre cette situation. Si les mentalités n’évoluent pas et que la justice ne se saisit pas du sujet, on risque de renforcer l’isolement des personnes en situation de surpoids.