Forfait social à 30 % sur la rupture conventionnelle et la mise à la retraite : un effet d'annonce ?
Publié leSelon la réforme des retraites, le « forfait social » de 20 % sur l’indemnité de rupture conventionnelle sera porté à 30 % pour l’harmoniser avec celui de l’indemnité de mise en retraite. Qu’est-ce que le forfait social ? Porte-t-il sur la totalité de l’indemnité ou sur une partie. Cadre Averti décrypte pour vous le forfait social et son véritable impact.
Le forfait social ne s’applique que sur une partie de l’indemnité
Le forfait social est une taxe à la charge de l’employeur. Il n’affecte que la partie de l’indemnité sur laquelle le salarié paie de son côté la CSG/CRDS de 9,7%.
En effet, l’indemnité de rupture conventionnelle est soumise aux prélèvements sociaux suivants :
- Pour la partie qui correspond à l’indemnité légale et conventionnelle de licenciement (que l’employeur est tenu de payer à minima lors de la rupture conventionnelle), le salarié et l’employeur ne paient les charges sociales que sur la somme qui excède 87.984 € (soit deux fois le plafond de la Sécurité Sociale). Sur la somme inférieure à 87.984 €, le salarié ne paie aucune taxe. En revanche, l’employeur doit acquitter un « forfait social » de 20 %.
- Quand l’employeur verse une indemnité supplémentaire cette dernière est soumise à des prélèvements sociaux différents :
• La partie qui ajoutée à l’indemnité légale et conventionnelle est inférieure à 87.984 € n’est pas soumise aux charges sociales mais à la CSG/CRDS de 9,7 % à la charge du salarié. L’employeur paie, de son côté, 20 % au titre du forfait social.
• La partie de l’indemnité supplémentaire qui, ajoutée à l’indemnité légale et conventionne, excède 87.984 € est soumise aux charges sociales, salariales et patronales.
Quel est le montant maximum du forfait social à 30% ?
Il est prévu que l’augmentation du forfait social de 20% à 30% génère un supplément de recettes de 300 millions d’euros. Il y a eu 454 000 ruptures conventionnelles en 2021 avec une augmentation record en 2022, non encore connue.
Si l’on retient le chiffre de 454 000 ruptures, le forfait social s’établit à une moyenne de 900 millions d’euros divisée par 454 000 = 1 982 €. Certes il y aura des disparités puisque nombre de ruptures conventionnelles portent sur de faibles indemnités. En tout état de cause, si le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle dépasse de 87.984 €, donnant lieu au paiement des charges sociales pour la partie supérieure à ce montant, le forfait social imputable à l’employeur sera de 87.984 x 30 % = 26.395 € (au lieu de 17.596 € à 20 %).
Le forfait social de 30 % s’appliquerait désormais à l’indemnité de mise en retraite.
Tout d’abord, il ne faut pas confondre le départ en retraite et la mise en retraite. Quand c’est le salarié qui décide de partir de lui-même en retraite, il perçoit une indemnité de départ en retraite particulièrement modique, fixée par la loi à un maximum de 2 mois (sauf si la convention collective est plus généreuse).
Quand c’est l’employeur qui met le salarié en retraite, sachant que l’âge légal de mise en retraite est de 70 ans (sauf un dispositif qui permet de faire partir le salarié à partir de 67 ans, mais avec son accord), il doit verser à ce dernier une indemnité de mise en retraite équivalente à l’indemnité légale de licenciement, soit 1/4 de mois par année de présence jusqu’à 10 ans et 1/3 de mois pour les années supplémentaires (sauf si la convention collective prévoit une indemnité supérieure).
Au surplus, à l’heure actuelle l’employeur doit payer une taxe de 50 % sur la totalité de la somme. Ainsi, si le salarié a 40 ans d’ancienneté l’employeur doit lui verser 12,5 mois d’indemnité légale de mise en retraite + 50 % de taxes = 18 mois de salaire.
Voilà comment on récompense un employeur particulièrement vertueux qui a permis au salarié de prolonger sa carrière très tardivement.
La réforme prévoit donc la suppression de la taxe de 50% mais en compensation elle instaure un forfait social de 30%.
En effet, l’indemnité de mise à la retraite peut donner lieu pour partie au paiement par le salarié de la CSG/CRDS et donc du forfait social à la charge de l’employeur. L’employeur qui entend remercier le salarié de ses bons et loyaux services peut lui verser une indemnité de retraite supplémentaire dans les mêmes conditions sociales et fiscales que l’indemnité supplémentaire de rupture conventionnelle. Ainsi l’indemnité supplémentaire supérieure à l’indemnité légale et conventionnelle de mise en retraite est soumise à la CSG CRDS de 9,7% pour le salarié et l’employeur devra désormais payer 30% de la somme au titre du forfait social (de même qu’il devra payer le forfait social de 30 % sur le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de mise à la retraite exempt de charges sociales jusqu’au plafond de 87.984 €).
En raison de la rareté des mises en retraite du fait de l’âge requis, la différence d’assiette et de taux entre la taxe à 50% et le forfait social à 30% ne devrait être dérisoire.
C’est donc bien une légère augmentation de recettes qui est recherchée via l’augmentation du taux du forfait social sur les ruptures conventionnelles. Il n’y a pas de volonté de dissuader les employeurs de pratiquer ce mode de rupture qui leur permet d’éviter le conflit lié au licenciement.