Clause de non-concurrence : plus de renouvellement sans l’accord du salarié

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Clause de non-concurrence : plus de renouvellement sans l’accord du salarié

A une époque de plus grande mobilité des salariés, la clause de non-concurrence est une entrave considérable quand on entend poursuivre sa carrière dans le même secteur d’activité, surtout si la durée de l’interdiction s’éternise, obligeant le salarié à changer de métier. La Cour de Cassation vient de rendre un arrêt favorable au salarié. Il peut s’opposer au renouvellement de la clause de non-concurrence qui était prévue dans son contrat et ainsi en réduire la durée.

Pourquoi la clause de non-concurrence renouvelable est-elle préjudiciable pour le salarié ?

Parce que le salarié a absolument besoin de savoir, quand il quitte son employeur et recherche un poste à l’extérieur, jusqu’à quand il sera soumis à l’interdiction de concurrence. A l’heure actuelle, les salariés changent d’emploi beaucoup plus fréquemment qu’auparavant et leur désir est de progresser dans leur secteur d’activité, capitalisant sur leur expérience et leur réseau, sans être tenu de changer d’activité à chaque fois qu’ils changent d’employeur parce qu’ils sont liés par une clause de non-concurrence dont la durée est trop longue.

Ainsi, en cas d’interdiction de concurrence d’un an, le salarié peut s’organiser et s’il retrouve un poste rapidement, ce qui lui prendra sans doute quand même un certain nombre de mois, il pourra en retarder la prise d’effet de façon à respecter la durée prévue par la clause. En revanche, s’il est soumis à une clause de non-concurrence d’un an renouvelable une fois pour une période de même durée, soit deux ans au total, il doit, dès le départ, renoncer à rechercher un emploi concurrentiel faute de savoir à l’avance si l’employeur renouvellera au bout d’un an, la clause de non-concurrence pour une année supplémentaire. Il doit alors d’emblée envisager de changer d’activité, sinon de métier. 

La clause de non-concurrence renouvelable : la possibilité de réduire de moitié l’indemnité de non-concurrence. 

Outre le fait de bloquer en réalité le salarié, non pas pendant un an, mais en raison de l’aléa résultant du renouvellement, pendant deux ans, la clause de non-concurrence renouvelable pénalise le salarié sur le plan financier. L’employeur, au moment du renouvellement prendra en considération la situation du salarié. Soit ce dernier est toujours en recherche professionnelle et en raison du risque qu’il représente sur le plan de la concurrence, par exemple du fait de son fort réseau commercial, il décidera de renouveler la clause. Soit constatant que le salarié a pris un nouvel emploi dans une activité non-concurrentielle, il ne renouvellera pas l’interdiction de non-concurrence et économisera ainsi le montant de l’indemnité de non-concurrence qu’il aurait dû payer sur la deuxième année.

La clause de non-concurrence renouvelable est-elle répandue ?

Elle est fréquente, puisque notamment la convention de la métallurgie, soit celle qui totalise le plus grand nombre de salariés, encadre la clause de non-concurrence par des dispositions spécifiques, notamment la durée : « l’interdiction (de concurrence) ne peut excéder une durée d’un an renouvelable une fois ».

Par ailleurs, beaucoup de conventions, et notamment la convention qui regroupe les activités de conseil, SYNTEC, ne fixent pas de règles concernant la clause de non-concurrence, qui est alors laissée à l’appréciation de l’employeur.

Le salarié qui se voit imposer une clause de non-concurrence renouvelable, risque d’être encore plus fortement pénalisé si la contrepartie financière que fixe librement l’employeur est cantonnée à 20 % ou 25 % du salaire mensuel, alors que l’indemnité de non-concurrence de la métallurgie est au minimum de 50 % . Or, la contrepartie financière peut être décisive puisque le salarié peut la cumuler avec l’indemnité Pôle Emploi, et c’est ce qui lui permettra de « tenir », quand il entend rester dans le même secteur d’activité, jusqu’à l’expiration de la clause de non-concurrence.

Clause de non-concurrence renouvelable : comment la Cour de Cassation a-t-elle réparé cette injustice ?

La Cour de Cassation était face à un dilemme. Certes, il fallait supprimer la possibilité pour l’employeur de renouveler la clause de non-concurrence. Mais si la clause prévoyant un renouvellement était annulée, les conséquences pour les employeurs, notamment ceux de la métallurgie, étaient gravissimes. Toutes les clauses de non-concurrence renouvelables figurant dans les contrats de travail des salariés tombaient et les salariés en poste ou en partance n’étaient plus soumis à aucune interdiction de concurrence. On se souvient qu’en 2002 la Cour de Cassation avait annulé les clauses de non-concurrence non rémunérées, soit la plupart des clauses qui n’étaient pas encadrées par une convention collective avec des effets très préoccupants pour les employeurs.

Seule la clause précisant que le renouvellement est à la discrétion de l’employeur est nulle.

Dans son arrêt du 13 septembre 2023 (n° 21-12.006), la Cour de Cassation tranche le cas  d’un salarié lié par la clause de non-concurrence de la métallurgie qui avait violé cette dernière dès la première année. L’employeur lui réclamait le remboursement de l’indemnité de non-concurrence ainsi que les pénalités prévues dans le contrat de travail. Le salarié ripostait, soutenant que la clause était nulle puisqu’en permettant à l’employeur de renouveler, et donc d’étendre, la période d’interdiction, elle le laissait dans l’incertitude quant à l’étendue de sa liberté de travailler. La Cour d’Appel de Lyon avait débouté le salarié au motif que la période d’interdiction était bien limitée dans le temps, soit deux ans maximum, ce dont le salarié avait eu connaissance depuis le départ. 

A tort, selon la Cour de Cassation : « La clause selon laquelle l’employeur se réserve seul la faculté après rupture du contrat de renouveler la clause de la durée de non-concurrence est nulle ».

Pour autant, la clause de non-concurrence de la métallurgie n’est pas nulle.

En effet, si la Cour de Cassation donne satisfaction au salarié, c’est parce que la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail de ce dernier était libellée de la façon suivante : « L’interdiction de non-concurrence sera limité à une période d’un an renouvelable une fois pour semblable durée à l’option de la société commençant le jour de la cessation effective du contrat ». Or, la convention de la métallurgie prévoit que « L’interdiction ne peut excéder une durée d’un an renouvelable une fois » . Il est évident que seul l’employeur a la faculté de renouveler l’interdiction de non-concurrence mais cela n’est pas expressément mentionné.

Il suffit donc pour les employeurs de la métallurgie d’interroger le salarié lors du renouvellement de l’interdiction de non-concurrence. Comme ce dernier sait à l’avance qu’il pourra refuser, il sait également que son interdiction de non-concurrence sera limitée à un an. Et quant à l’employeur il pourra au moins appliquer la clause existante pendant la période initiale, plutôt que d’être exposé à la liberté concurrentielle du salarié dès la rupture du contrat de travail. C’est une solution ingénieuse.

Désormais le salarié dont le contrat de travail prévoit une clause de non-concurrence renouvelable n’est en réalité lié que pendant la période initiale puisqu’il ne peut plus y avoir de renouvellement sans son accord.


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