Quand et comment faut-il prendre acte de la rupture ?
Je veux prendre acte de la rupture de mon contrat de travail, comment dois-je faire ?
Le salarié qui veut faire une prise d’acte de rupture doit adresser une lettre recommandée avec accusé de réception à son employeur. Par cette lettre, il dénonce des conditions de travail devenues anormales en raison de l'attitude, et généralement de la mauvaise foi, de l'employeur.
A titre d’exemple, les raisons suivantes pourront être évoquées :
- rétrogradation,
- harcèlement, placardisation,
- mais également modification des horaires,
- non-paiement du salaire,
- etc.. . .
Dans cette lettre, le salarié, après avoir énuméré les manquements qu'il reproche à l'employeur, annonce qu'il quitte son emploi de façon immédiate. II l'avertit qu'il saisit le Conseil de Prud'hommes compétent pour lui demander de reconnaître son bon droit, et requalifier la prise d'acte de rupture du contrat de travail en licenciement injustifié.
II indique dans quelles conditions il entend restituer ses matériels de travail (ordinateur, téléphone, voiture de fonction, etc.). II demande à l'employeur de lui envoyer son solde de tout compte.
Je suis insatisfait de mon employeur et j’ai un nouvel emploi qui m’attend. Puis-je utiliser la prise d'acte de rupture ?
Non, il faut l'utiliser à bon escient.
Le salarié qui n'a aucun reproche majeur à faire à son employeur mais qui a accepté une offre d'embauche à l'extérieur, avec une date de prise de poste très rapide, peut être tenté d’utiliser, de mauvaise foi, la prise d’acte de rupture du contrat de travail pour éviter d’effectuer son préavis (généralement 3 mois pour les cadres).
Cette attitude sera jugée cynique et peu scrupuleuse, et pourrait lui coûter cher plus tard.
Ainsi, si conscient que sa prise d’acte de rupture ne reposait sur aucune raison sérieuse le salarié se dispense de lancer la procédure devant le Conseil de Prud'hommes, l'employeur pourra alors le faire de son côté. Il fera condamner la salariée à lui payer, outre le salaire correspondant au préavis non exécuté, des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par l’entreprise du fait de ce départ précipité.
A quoi dois-je faire attention si je veux que ma prise d’acte de rupture soit reconnue ?
Pour obtenir gain de cause devant le Conseil de Prud’hommes, le salarié devra à la fois démontrer une situation anormale et la mauvaise foi de l’employeur. Ainsi le fait pour l’employeur de ne pas payer le salaire ne légitimera pas la prise d’acte de rupture s’il est démontré que la carence était due à des difficultés économiques passagères.
Avant tout, le salarié devra apporter la preuve de sa bonne foi, à lui. Une prise d’acte de rupture qui intervient de façon brutale sans que le salarié ne se soit jamais plaint auparavant sera suspecte. Très souvent dans un tel cas, on s’aperçoit par la suite que le salarié a immédiatement pris ses fonctions au sein d’une autre entreprise.
En revanche, si le salarié finit par prendre acte de la rupture de son contrat de travail alors qu’il se plaint depuis de nombreux mois de l’attitude de l’employeur, il ne sera pas soupçonné d’avoir provoqué brusquement un conflit parce qu’un nouvel emploi l’attendait. Bien sûr, il est tout à fait normal qu’un salarié qui a dénoncé une situation de travail dégradée se mette à rechercher un nouvel emploi et finisse par le trouver. Toutefois, cette recherche prendra forcément un certain temps.
Si le salarié trouve un emploi 6 à 12 mois après sa dénonciation du harcèlement moral, il fera alors une prise d’acte de rupture pour prendre son nouvel emploi. Toutefois, compte tenu du temps qui se sera écoulé entre le début du conflit avec l’employeur et la date de la prise d’acte, cette dernière ne saura être considérée comme « suspecte ».
J’ai déjà fait une demande de résiliation judiciaire, mais je veux partir maintenant. Puis-je faire une prise d’acte de rupture ?
Oui. Dans la mesure où le salarié est toujours en poste, il peut modifier ses demandes devant le Conseil de Prud'hommes en raison d’éléments nouveaux qui interviennent dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail.
Le salarié qui prend acte de la rupture de son contrat de travail alors qu'il a déjà saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire, annulera sa demande de résiliation, puisque le contrat de travail sera déjà rompu (du fait de la prise d'acte de rupture) au moment où l'affaire sera plaidée. En revanche, il demandera que la prise d'acte de rupture soit reconnue et requalifiée en licenciement injustifié avec le paiement des indemnités correspondantes.
Le Conseil de Prud'hommes tiendra compte du contexte dans lequel le salarié avait à l’époque demandé la résiliation judiciaire.
J’entends faire une prise d’acte de rupture mais sans départ immédiat, en proposant d’effectuer mon préavis. Est-ce possible ?
Non, la prise d'acte de la rupture implique que l’employeur a une attitude d’une telle gravité qu'elle empêche le salarié d'effectuer son préavis, raison pour laquelle il quitte l’entreprise de façon immédiate.
En revanche, si le salarié estime que l'employeur a commis des manquements importants, mais que ceux-ci ne sont pas assez graves pour justifier un départ immédiat, ou que son départ aurait des conséquences gravissimes (perte de chiffre d'affaires, désorganisation de l'équipe), il peut recourir à une autre démarche : la démission motivée.
De cette façon, le salarié qui souhaite que la responsabilité de la rupture du contrat de travail soit au final imputée à l'employeur, ne prend pas le risque d’être condamné pour avoir déserté son poste.
Le salarié adresse à l’employeur une lettre recommandée par laquelle il annonce qu'il démissionne en raison des faits qu'il lui reproche et qui rendent la poursuite de son contrat de travail impossible.
Dans sa lettre, le salarié devra expressément indiquer que sa démission est motivée par les manquements de l’employeur. Il précisera cependant que pour éviter que son départ immédiat n’ait provoque des conséquences particulièrement néfastes pour l’entreprise il entend effectuer son préavis.
II annoncera qu'il entend demander au Conseil de Prud'hommes de requalifier sa démission motivée en licenciement fautif aux torts de l’employeur.
Le seul risque auquel il s'expose alors, est un refus du Conseil de Prud'hommes de requalifier la démission en licenciement. En revanche, ayant respecté son préavis, il sera à l'abri de toute condamnation financière au profit de l'employeur (hormis l'article 700 du Code de Procédure Civile, soit une faible participation aux frais de défense de l'employeur, rarement accordée).
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