Quiet firing ou harcèlement démissionnaire : quand l’employeur pousse à la démission 

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Quiet firing ou harcèlement démissionnaire : quand l’employeur pousse à la démission 

35% des employés victimes de « quiet firing » aux Etats-Unis selon LinkedIn News :  qu’en est-il en France ? Malheureusement les entreprises n’ont pas attendu le « Quiet firing » pour pratiquer du harcèlement moral démissionnaire ! Soit le fait de dégrader exprès les conditions de travail d’un salarié, pour l’inciter à partir de lui même dans le cadre d’une démission, ce qui évite de lui verser des indemnités de licenciement. 

Bore-out, un placard en attendant la sortie 

S’ennuyer à mourir. Une expression pleine de sens pour ces trop nombreux salariés qui n’ont pas, ou peu, de choses à faire au travail. Dans les entreprises comme dans l'administration, les placards sont évoqués entre collègues, toujours sous le manteau, puisqu'ils n'existent pas officiellement. Pourtant, dans une note sur l'emploi des seniors, l'Institut Montaigne évalue à 200.000 le nombre de personnes punies à ne rien faire ou presque tout en restant payées. Les conséquences sont les mêmes que pour le burn out : la souffrance jusqu’à la dépression grave. Le coût pour la société française serait de l’ordre de 10 milliards par an, soit 50.000 euros par salarié au placard. 

Quiet firing : la définition d’une organisation oppressante

Il convient de rappeler une notion issue de l’arrêt de la Cour de Cassation (Crim. 5 juin 2018, n° 17-87.524) : « les décisions d’organisation prises dans le cadre professionnel peuvent, dans un contexte particulier, être source d’insécurité permanente pour tout le personnel, et devenir alors harcelantes pour certains salariés ». Comme dans les arrêts France Télécom, les juges reconnaissent désormais la notion de « harcèlement institutionnel » qui a « pour spécificité d’être en cascade, avec un effet de ruissellement, indépendamment de l’absence de lien hiérarchique entre le prévenu et la victime ». Fin septembre 2022, la cour d’appel de Paris a d’ailleurs déclaré coupables, comme auteurs ou complices, quatre des six prévenus, pour avoir conçu et mis en œuvre un plan de réorganisation ayant favorisé au sein de l’entreprise une forme de « harcèlement moral institutionnel ».

Quiet firing : des exemples de méthodes aux conséquences anxiogènes 

Il existe plusieurs sortes d’actions qui peuvent pousser un salarié à démissionner de son entreprise. C’est le cas par exemple quand son employeur ne lui donne pas d’augmentation pendant des années, qu’il lui confie des tâches moins attrayantes ou qu’il ne lui donne aucune opportunité de développement ou de leadership. L’employeur peut également démoraliser le salarié en favorisant les autres et en l’excluant des réunions et des décisions importantes. « Les employeurs peuvent refuser les demandes de congé des employés, augmenter la charge de travail sans augmenter les salaires, refuser de régler les conflits sur le lieu de travail, refuser les pauses pendant la journée de travail, exiger des heures supplémentaires ou avoir besoin d’un accès constant à l’employé » relève encore Anjali Gowda Ferguson, psychologue clinicienne.

Les salariés âgés et avec de l’ancienneté premiers visés ! 

Beaucoup d’entreprises poussent vers la sortie leurs salariés âgés, notamment les cadres qui ont une rémunération élevée. En effet, les préjugés sur les salariés âgés persistent : ils sont trop souvent considérés comme chers, peu adaptables, sans la maîtrise de l’anglais ou des outils digitaux, etc. Or, leurs indemnités de licenciement peuvent être élevées surtout s’ils ont de l’ancienneté puisque dans le cas contraire avec le barème Macron les indemnités sont réduites. Par conséquent l’employeur est tenté de les inciter à partir d’eux-mêmes en les soumettant à des procédés de « Quiet firing » ou de harcèlement démissionnaire ! En pratique dans certaines organisations, on demande même explicitement aux managers de mettre en place des stratégies pour que les salariés partent d’eux-mêmes. Dans ce dernier cas, si un manager arrive à prouver qu’il a agi sur ordre de la direction il ne pourra pas être licencié pour cela (12 juillet 2022 n° 20-22.857). 

Quel lien entre « Quiet firing » et « Quiet Quitting » ? 

Les conséquences du « Quiet firing » ou « harcèlement démissionnaire » sont désastreuses car elles entraînent la déstabilisation non seulement des salariés visés mais également de tous les collègues qui sont témoins de ces procédés. Ces derniers sont alors tentés de pratiquer du « Quiet Quitting » également appelé « démission silencieuse ». Ils se contentent d’effectuer les prestations justifiant le paiement de leur salaire, rien de plus ! Le préjudice est au final très important, non seulement pour l’ entreprise qui démotive ainsi ses salariés, mais aussi pour les entreprises en général. Les cadres, mêmes insatisfaits, pensent désormais que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Ainsi, selon le baromètre APEC du 22 août 2022, 84% des entreprises éprouveraient des grandes difficultés à finaliser les processus de recrutement de cadres. 

 

Après le « quiet firing » des directions, le temps du « prud’homming » re-viendra-t-il pour les salariés concernés ?

 


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