Inaptitude au travail : quelles indemnités ? 

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Inaptitude au travail : quelles indemnités ? 

À l'issue d’un arrêt de travail d’au moins trois mois, le salarié doit passer une visite médicale de reprise au cours de laquelle le médecin du travail peut constater l’inaptitude du salarié à reprendre son poste, voire même, tout poste dans l'entreprise. Le salarié risque d'être licencié pour inaptitude, il se demande alors souvent quels seront ses revenus. 

Quelle est la procédure pour un licenciement pour inaptitude ?

Le salarié qui, dans le cadre d’une visite de reprise, est déclaré inapte par le médecin du travail n’est pas rémunéré pendant le délai d’un mois dont dispose l’employeur pour le reclasser ou le licencier. 

L’employé concerné devra se voir offrir pendant cette période un autre poste adapté à ses capacités, et au moins égal à l’emploi qu’il occupait initialement. Dans le cas où un reclassement ne serait pas possible ou que le salarié le refuse, la loi prévoit que l’employeur peut mettre fin au contrat de travail et donc procéder au licenciement. Si au terme d'un délai d'un mois, l'employeur n'a ni reclassé ni licencié le salarié déclaré inapte dans le cadre d'une visite de reprise, il doit reprendre le versement du salaire correspondant à l'emploi occupé avant l'arrêt de travail. 

Quel droit au chômage après un licenciement pour inaptitude au travail ?

Toute perte d’emploi involontaire ouvre, en principe, droit à l’ARE. Après un licenciement pour inaptitude, la personne licenciée peut ainsi s'inscrire auprès de Pôle emploi. Elle recevra après un délai de carence de 7 jours minimum son premier versement. L’allocation est calculée à partir des rémunérations brutes, hors des périodes où le salarié était absent pour maladie. Après un licenciement pour inaptitude, le salarié a également le droit à d'autres indemnités comme l'indemnité de licenciement.

Inaptitude au travail : quels sont les indemnités et les avantages ? 

Beaucoup de salariés craignent de ne percevoir aucune indemnité lorsqu’ils sont licenciés pour inaptitude, partant du principe que l’employeur ne leur doit rien puisqu’il subit le licenciement plutôt que de le provoquer. Or, en cas de licenciement pour inaptitude au travail, l’employeur doit verser une indemnité de licenciement dont le montant ne peut pas être inférieur à l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9 du code du travail (c’est-à-dire à l’indemnité légale de licenciement) ou au double de celle-ci si l’inaptitude au travail est consécutive à une maladie ou à un accident professionnel. Si le salarié bénéficie d’une convention collective favorable, l’indemnité de licenciement sera plus élevée.

Inaptitude au travail : quels sont les inconvénients ? 

Les inconvénients sont limités. Outre la perte de salaire d’un mois que devra subir le salarié tant que l’employeur ne l’a pas reclassé ou licencié (sachant que si l’inaptitude au travail est la conséquence d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle le salarié touchera alors les indemnités journalières), l’autre inconvénient est que le salarié sera privé de l’indemnité de préavis faute de pouvoir exécuter ce dernier du fait de l’inaptitude au travail. Le contrat de travail est donc rompu à la date de notification du licenciement.

Peut-on demander sa retraite à taux plein pour inaptitude au travail ?

Oui, dans certaines conditions. En principe l’âge de la retraite étant de 62 ans, si le salarié atteint cet âge il peut partir en retraite. Toutefois, s’il n’a pas cotisé le nombre de trimestres nécessaires il prend alors sa retraite à taux partiel avec une décote importante sur ses indemnités de retraite. Or, le salarié déclaré inapte peut obtenir sa retraite de base au taux maximum (aussi appelé "taux plein"), quel que soit le nombre de trimestres pour lesquels il a cotisé. C’est un avantage important puisque c’est seulement à 67 ans que le salarié qui n’a pas cotisé le nombre de trimestres suffisants peut faire valoir sa retraite à taux plein sans décote. Le salarié licencié pour inaptitude doit établir un dossier auprès de la caisse régionale de retraite (Carsat) dont il dépend. L'inaptitude au travail doit être reconnue par le médecin-conseil de la caisse qui attribue la retraite. Le salarié inapte doit joindre un dossier médical à sa demande de retraite à taux plein. En revanche, il ne pourra plus bénéficier d’une surcote ouverte pour chaque trimestre travaillé au-delà de la durée d'assurance requise qui donne droit à une majoration de la pension de 1,25 % (soit 5 % par an). Si le salarié n’est pas reconnu inapte au travail par le service médical, il peut, soit maintenir sa demande et obtenir une retraite à un taux réduit (avec une décote), soit refuser de prendre sa retraite et transmettre une nouvelle demande plus tard.

L’employeur est-il tenu de licencier un salarié inapte ?

C’est la question à laquelle la Cour de Cassation a répondu dans une récente décision du 4 novembre 2021 (n° 19-18.908). Comme nous l’évoquions dans un récent article, la Cour de Cassation relève que : « l’employeur avait maintenu délibérément le salarié dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise sans aucune évolution possible ». Or, le fait de laisser le salarié déclaré inapte dans une situation d’inactivité contrainte, faute de procéder à son licenciement, constitue bien une faute de l’employeur. Quand le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail à la demande du salarié, la rupture prend alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou abusif (Cass. soc. 17 mars 1998, n° 96-41.884). 

A l’heure actuelle, l’employeur n’a pas intérêt à maintenir le salarié inapte dans ses effectifs, et donc de continuer à lui verser son salaire indéfiniment au mois le mois, sans procéder à son licenciement. Autrefois, s’il s’agissait d’un salarié proche de la retraite, l’employeur estimait qu’il était préférable de payer le salaire jusqu’à ce qu’il puisse mettre le salarié en retraite, ce qui lui coûtait moins cher que de verser à ce dernier ses indemnités de licenciement, qui pouvaient être élevées si le salarié avait beaucoup d’ancienneté (indemnité légale ou conventionnelle de licenciement). Or, à présent, l’employeur ne peut mettre le salarié à la retraite sans le consentement de celui-ci qu’à l’âge de 70 ans !

Par ailleurs, certains employeurs maintenaient indéfiniment les salariés déclarés inaptes dans leurs effectifs en payant chaque mois leur salaire, toujours pour éviter de leur payer les indemnités importantes de licenciement, partant du principe que le salarié finirait, tôt ou tard, par trouver un autre emploi et serait alors tenu de donner sa démission en renonçant à toutes indemnités de ruptures. Toutefois, depuis un arrêt du 4 mars 2021, l’employeur est tenu de payer son salaire au salarié inapte qu’il n’a pas licencié, et ce même si ce dernier a pris un nouvel emploi, touchant ainsi à la fin du mois un double salaire. L’employeur n’a donc plus aucun intérêt à retarder le licenciement.

En définitive, en plus des indemnisations liées à l’origine de l’inaptitude, le licenciement pour inaptitude ouvre droit pour le salarié licencié à des indemnités chômage.


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