De plus en plus de licenciements et de moins en moins de licenciements économiques, pourquoi ?

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De plus en plus de licenciements et de moins en moins de licenciements économiques, pourquoi ?

Le licenciement économique est protecteur. La Cour de Cassation le démontre à nouveau en renforçant l’obligation de reclassement de l’employeur. Toutefois, un récent graphique de la DARES démontre qu’alors que les licenciements pour cause personnelle s’envolent, les licenciements économiques deviennent marginaux ne représentant plus que 5,5% du total. Et si la raison en était que le licenciement pour cause personnelle, même abusif, coûte moins cher que le licenciement économique ?

Le licenciement économique, un licenciement protecteur pour le salarié

Les avantages du licenciement économique sont nombreux.

  • L’employeur doit respecter « l’ordre et les critères du licenciement » même dans le cadre d’un licenciement pour cause économique individuel. Les salarié âgé, anciens, handicapés, chargé de famille, sont ainsi d’avantage préservés.
  • Obligation de reclassement : l’employeur, avant de licencier pour cause économique doit proposer au salarié tous les postes vacants ou nouvellement créés au sein de l’entreprise qu’il est susceptible d’occuper.
  • Congé de reclassement : si l’effectif de l’entreprise est supérieur à 1000 personnes l’employeur doit offrir au salarié un congé de reclassement d’une durée supérieure au préavis.
  • Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) : si l’effectif de l’entreprise est inférieur à 1000 personnes, l’employeur doit proposer au salarié le contrat de sécurisation professionnelle qui lui offre, outre un accompagnement, une meilleure indemnisation pendant 1 an (75% du salaire au lieu de 56,7% au chômage).
  • Priorité de réembauche : l’employeur doit, pendant 1 an après le licenciement, proposer à son ancien salarié les postes devenus vacants ou nouvellement créés correspondant à sa compétence.
  • Réduction du délai maximum de carence France Travail : à 75 jours au lieu de 150 jours.
  • Même s’il est subjectif ce n’est pas le moindre des avantages : le salarié évite la lettre de licenciement pour cause personnelle, généralement extrêmement humiliante et infamante.

L’obligation de reclassement renforcée par la Cour de Cassation

Par un arrêt du 23 octobre 2024 (n°23-19.629), la Cour de Cassation rappelle que l’employeur, avant de licencier pour cause économique doit avoir accompli tous les efforts en vue de reclasser le salarié. Les propositions doivent s’étendre aux autres société du groupe dont l’activité permet le reclassement.

L’offre de reclassement doit être écrite et comporter toutes les informations permettant au salarié de prendre sa décision, à savoir :

  • l’intitulé et le descriptif précis du poste,
  • la classification du poste,
  • la nature du contrat,
  • la nom de l’employeur,
  • la localisation du poste,
  • le niveau de rémunération.

A défaut d’une seule de ces précisions l’offre de reclassement est incomplète et le salarié pourra obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

On constate donc que le licenciement économique est protecteur pour le salarié. Et pourtant il est en total régression.

Le licenciement économique ne représente plus que 5,5% des ruptures à l’initiative de l’employeur

C’est ce qui résulte du récent graphique de la DARES

 

De moins en moins de licenciements économiques

Graphique de la DARES publié en 2024 –

évolution du nombre de ruptures conventionnelles, licenciements économiques et

 licenciements non économiques entre 2007 et 2024

 

Alors que les licenciements pour cause personnelle (faute/ insuffisance professionnelle) ont progressé entre 2015 et 2024 de 95.351 à 220.708, ce à quoi il convient d’ajouter les ruptures conventionnelles qui sont en grande majorité initiées par l’employeur et qui ont augmenté pendant la même période de 85.631 à 126.624, les licenciements pour cause économique ont régressé de 31.888 à 23.340 en avril 2024.

Les illustrations suivantes montrent l’évolution :

De plus en plus de licenciements et de moins en moins de licenciements économiques

proportion du nombre de licenciements économiques par rapport aux licenciements non économiques et aux ruptures conventionnelles

La raison de la marginalisation du licenciement économique : le licenciement pour cause personnelle, même abusif, coûte moins cher que le licenciement économique

C’est l’effet du barème Macron institué en 2017 et qui limite les indemnités du licenciement abusif prononcé par le Conseil de Prud’hommes, en fonction de l’ancienneté, à savoir environ 1 mois de dommages et intérêts par année de présence jusqu’à 10 ans d’ancienneté et environ 0,5 mois au-delà, avec un plafond de 20 mois pour une ancienneté de 30 ans.

A l’heure actuelle, les licenciements se multiplient et les salariés ont généralement une ancienneté réduite. Ainsi un salarié qui a 2 ans d’ancienneté ne peut pas, quelles que soit les circonstances de la rupture, obtenir plus que 3 mois de dommages et intérêts pour licenciement abusif. Il ne saisira pas le Conseil de Prud’hommes pour percevoir une indemnité aussi faible. Voilà pourquoi l’employeur, même si les raisons du licenciement sont économiques (difficultés financières, nécessité de restructurer, réduction de masse salariale et donc d’effectifs) délaisse le licenciement économique, trop contraignant et coûteux, pour recourir au licenciement pour cause personnelle, puisqu’il ne craint plus les conséquences financières du licenciement abusif. Ou il propose la rupture conventionnelle, que le salarié accepte puisqu’il sait qu’il n’a pas grand-chose à gagner aux Prud’hommes.

Ce n’est donc qu’en cas de fermetures de sites industriels avec présence des syndicats, que le licenciement économique est amené à perdurer.



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