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Covid19 - L’entretien préalable au licenciement peut-il se dérouler à distance ?
Publié lePour éviter un déplacement, mon employeur me propose un entretien préalable par skype ou zoom. Est-ce valable ? En principe, il faut être présent physiquement, toutefois la jurisprudence récente admet des exceptions.
Le principe : la présence physique des parties
Quel que soit le motif invoqué (faute grave, économique ou inaptitude), l’employeur doit veiller à respecter une procédure stricte s’il souhaite licencier son salarié. L’employeur doit, dans un premier temps, convoquer le salarié à un entretien préalable de licenciement.
Article L1232-2 du code du travail :
« L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ».
L’entretien préalable est un moment particulier au sein de la procédure préalable au licenciement. Il doit permettre au salarié de se justifier des reproches qui lui sont faits et ainsi d’éviter le licenciement envisagé à son encontre, c’est la raison pour laquelle la Cour de Cassation a pu juger qu’une conversation téléphonique ne pouvait pas remplacer l’entretien préalable au licenciement prévu par le Code du travail (Cass. soc. 14 novembre 1991 n° 90-44.195).
L’exception : en distanciel en raison de certaines circonstances ?
L’organisation et le déroulement de cet entretien sont ainsi soumis à des règles particulières. Selon un arrêt de la Cour de cassation l'entretien doit se dérouler sur le lieu de travail du salarié ou au siège social de l'entreprise. L'employeur ne peut pas librement y déroger et fixer à sa guise le lieu, sous peine de sanctions pour irrégularité de procédure. Toutefois, il peut y déroger en cas de circonstances exceptionnelles qui rendent impossible la tenue de l'entretien au siège ou sur le lieu de travail (Cass. soc., 20 octobre 2009, n° 08-42155).
Un entretien préalable au licenciement à distance (en visioconférence) peut ainsi se justifier en raison de l’éloignement géographique des parties selon la Cour d’appel de Versailles (CA Versailles, 4 juin 2020 n°17/04940). Dans cette décision, le juge reconnaît la validité d’un entretien préalable eu égard aux circonstances de l’espèce, puisque le salarié était expatrié par sa société à Dubaï. La cour d’appel de Versailles pose toutefois deux conditions : les droits du salarié doivent être respectés et celui-ci doit avoir été en mesure de se défendre utilement.
Des doutes qui subsistent
Cette décision doit être rapprochée de précédentes affaires comme celles de la cour d’appel de Rennes qui admettait déjà le recours à la visioconférence dès lors que les parties étaient d’accord (CA Rennes 11 mai 2016 n° 14/08483). Un doute subsiste toutefois, car des juridictions refusent encore cette modalité d’organisation de l’entretien préalable au licenciement. La cour d’appel de Grenoble a refusé le 7 janvier 2020 de reconnaître la validité de la procédure de licenciement par visioconférence, jugeant que les dispositions du Code du travail ne permettaient pas un autre mode que la rencontre physique (CA Grenoble 7 janvier 2020 n° 17/02442).
Cette imprécision est d’autant plus dommageable que la situation sanitaire encourage les employeurs et les salariés à travailler à distance et à limiter les contacts physiques. Nul doute que la Cour de Cassation viendra utilement se prononcer sur le sujet.
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